I- En quoi la durabilité est-elle une question d'actualité ?

Le changement climatique, un defi majeur

Le changement climatique est l'une des préoccupations majeures des Français en 2021. De nombreuses discussions sur le développement durable et les débats écologiques le montrent. Aujourd'hui, la notion de développement durable apparaît partout, que ce soit sur nos écrans, dans nos journaux, ou à table pendant une discussion familiale.

En France, ce terme est enseigné dès le collège. On n'est pas les seuls à être obsédés par le changement climatique et la durabilité. Les investisseurs et les entreprises font aussi le pas vers un monde plus vert. Sur une durée de dix ans, plus de 580 fonds conventionnels en Europe se sont réorientés vers des stratégies qui se basent sur le développement durable !

Quand on pense au changement climatique, on parle souvent de la hausse des niveaux des mers, de la pollution, de l'impact sur les animaux et du dérèglement climatique. Mais il affecte aussi les portefeuilles des investisseurs via des répercussions profondes sur l'économie, avec des chocs dans le marché du travail, une hausse de la demande énergétique et une augmentation de l'imprévisibilité du monde agricole.

La hausse en popularité des investissements durables s'accompagne de nombreuses études sur le sujet. Il y aurait autant d'études effectuées sur la performance des fonds durables entre 2015 à 2020 que le total des études parues sur le sujet avant 2015. C'est donc un sujet qui concerne tout le monde.

Mais concilier performance économique et développement durable, est-ce possible ?

Le développement durable, plus qu'une simple tendance

Si on reprend la définition du développement durable, il se base sur trois piliers : l'économie, la société et l'écologie. C'est l'ancienne première ministre de Norvège, Gro Harlem Bruntland qui en a donné la définition comme on la connaît aujourd'hui :

"un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs".

Donc, en principe, le développement durable s'accompagne d'une croissance économique. Mais cela n'est pas l'avis de tout le monde : l'expert en écologie économique, Frederico Demaria, n'est pas d'accord. Il est connu pour avoir mis en avant la décroissance afin de sauver la planète.

La croissance économique est par définition la hausse de la production de biens et services. Cette hausse se traduit par une plus grande utilisation de matières premières, et donc une dégradation de l'environnement.

Mais une autre vision est possible : la protection de l'environnement participe à la croissance économique ! Défendue par Steve Cohen, professeur de l'université de Columbia à New York, qui cite les activités visant à protéger la planète comme le traitement des eaux, le développement des énergies renouvelables, la construction des espaces verts, comme des activités qui participent à la hausse du produit intérieur brut (PIB) et donc à la croissance économique.

Nous voyons de plus en plus d'initiatives écologiques partagées sur Internet, sur les réseaux et dans les articles de presse. Le géant Netflix, par exemple, a annoncé le mois dernier son plan "Net Zero Carbone" d'ici la fin 2022. De nombreux acteurs s'y mettent et doivent faire financer leurs projets. Mais est-ce que vous savez si votre épargne finance ce genre de projet ?

Et oui, l'épargne est une des sources principales de financement d'investissements et des entreprises ! Vous financez donc, via votre épargne, l'économie réelle, c'est-à-dire des secteurs et des projets précis.

Votre épargne peut financer ce genre de projets, mais c'est rarement le cas ! Les banques françaises investissent plus de 70% de votre épargne dans des investissements d'énergies fossiles ! (Oxfam, Comment les banques françaises financent les énergies fossiles, 2018).

II- La transition vers les investissements durables, ou investissements ESG

Avant de se lancer sur comment on peut être acteur de la finance verte, on va d'abord parler d'investissement durable, souvent aussi appelés des " investissements ESG ". Ceux sont des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance utilisés pour évaluer des entreprises et des fonds. Ce sont des organismes spécialisés et indépendants qui attribuent les notes ESG afin d'éviter un biais par des entreprises qui chercheraient à définir leurs propres méthodologies et interprétations de durabilité. Pour en savoir plus sur les fonds verts, lisez notre article sur les fonds labellisés.

Comme nous l'avons mentionné précédemment, les investisseurs se sentent de plus en plus concernés par le développement durable. La collecte des fonds durables est en hausse exponentielle depuis 2019. Vers la fin de l'année dernière, la collecte aurait atteint les 80,5 milliards de dollars US au niveau mondial (MorningStar, Guide Morningstar : La sélection selon les critères ESG, 2021).

Plusieurs raisons existent pour expliquer que les investisseurs se tournent de plus en plus vers des investissements durables et des investissements verts. En effet, ils évitent de financer des pratiques peu honnêtes qui pourraient engendrer des risques liés à la réputation, comme la confidentialité de donnés ou la création de marées noires. Quand la réputation d'une entreprise se dégrade, la valeur de ses actions se dégrade aussi, entraînant de grosses pertes financières.

Les critères ESG suivent des normes et des règles strictes qui encouragent la transparence des entreprises. Ceci permet aux investisseurs d'avoir plus confiance en leurs choix financiers et d'exclure certains fonds qui ne sont pas alignés avec les critères ESG. Les fonds qui financent des énergies fossiles, de l'armement, de la déforestation ou des secteurs polluants, par exemple, peuvent être plus facilement exclus de leur portefeuille. C'est le "screening" ou le filtre d'investissements négatif. Bien entendu, le "screening" positif existe aussi ! Les investisseurs peuvent sélectionner les fonds ou les firmes avec de bonnes notes ESG, mais qui sont tout aussi rentables.

Et quand on regarde les chiffres, on voit que les investissements durables performent généralement mieux que leurs pairs conventionnels !

Les investissements durables, performance et rendement

Une étude publiée il y a deux mois au sein de l'université de New York (NYU) a repris 1000 recherches des cinq dernières années sur les investissements ESG et leur performance. On a trouvé, parmi d'autres conclusions, que :

  1. les fonds durables ont une meilleure performance sur le long terme. Les firmes avec des notes ESG très élevées pouvaient toucher un rendement jusqu'à 3,8% plus élevés par écart-type du score ESG à moyen ou long term ;
  2. les fonds durables faisaient mieux face aux crises sociales et économiques. Pendant la crise financière de 2008 ET la crise mondiale liée au coronavirus, les investissements ESG étaient plus résistants et performaient mieux que les investissements conventionnels ;
  3. la bonne performance des fonds durables est stimulée via des facteurs intermédiaires comme une meilleure gestion de risque, la place à l'innovation, une meilleure efficacité opérationnelle, ainsi qu'une meilleure relation entre parties prenantes (investisseurs, employés, fournisseurs, etc).

Les chiffres de MorningStar corroborent ces conclusions : pendant la crise sanitaire, " les fonds durables ont (...) mieux résisté que leurs équivalents traditionnels". Et que sur une comparaison des investissements qui datent d'il y a dix ans, 72% des fonds ESG contre seulement 49% pour les fonds traditionnels.

Donc placer son argent dans des fonds verts ou durables ne se traduit pas par un rendement moindre. On répond à la question qu'on se pose depuis le début : oui, performance et développement durable sont bien compatibles.

Et on dirait que ce n'est pas une simple tendance du moment. Dès 2022, les firmes de l'Union européenne vont devoir faire preuve de plus de transparence et de solidarité en définissant leurs objectifs pour la lutte contre le changement climatique et comment elles comptent s'adapter à celui-ci.

Aujourd'hui, on sait que les investissements verts et durables ont des rendements intéressants. Malgré de nombreuses théories avancés par les économistes, il y a encore très peu d'études sur pourquoi c'est le cas. Vu le nombre d'études qu'il y a eu sur les fonds ESG ces cinq dernières années, on aura sûrement plus de réponses là-dessus dans le futur proche.

Comment peut-on investir dans l'économie verte ?

Est-ce que vous faites attention à votre consommation de produits animaux ? Est-ce que vous évitez l'utilisation de plastique ou de produits à usage unique ? Est-ce que vous utilisez les transports en commun, le covoiturage, le vélo, la trottinette, ou encore vos pieds pour vous déplacer ? Si vous dites oui à au moins une de ses questions, on vous félicite et vous encourage à continuer ainsi !

Est-ce que vous savez ce que finance votre épargne ? Sur 10 € épargnés, 7 € financent les énergies fossiles. Et si vous avez 1 000 € mise de côté ? C'est 700 € vers des industries polluantes. (Oxfam, Comment les banques françaises financent les énergies fossiles, 2018).

En réalité, encore très peu de gens s'en rendent compte. On fait sûrement attention à notre consommation et nos actions de tous les jours, mais quand on pense à son argent qui dort tranquillement dans un compte épargne, on beaucoup fait moins attention. Nos efforts pour minimiser notre empreinte carbone sont gâchés par notre épargne.

La réponse est simple : assurez-vous que votre épargne ne finance pas des industries qui ne sont pas alignés avec vos valeurs. Pour savoir comment faire, on vous a listé quelques actions à faire à la fin de votre lecture.

Le changement climatique peut-il alors impacter le rendement des actions ?

L’activité économique et industrielle n’est pas épargnée par le changement climatique, dont l’impact n’est plus aujourd’hui discuté. Selon une étude de Schroders, le changement climatique a un impact direct et indirect sur le rendement des actions et varie selon les pays. Cela peut s’expliquer de trois manières :

  • Le coût de la transition : il prend en compte l’impact économique des actions contre le réchauffement climatique. À ce titre, les entreprises européennes, pionnières sur la thématique du développement durable et de la transition écologique, sont favorablement exposées. Le plan ambitieux de soutien à la transition écologique annoncé par Joe Biden et les engagements de la Chine et du Japon permettent également de soutenir les entreprises et d’accélérer la transition vers une économie décarbonée.
  • Le coût physique : il prend en compte la répercussion de la hausse des températures sur la production et la productivité. Une étude publiée par Stanford de Marshall Burke et Vincent Tanutama a démontré que la hausse des températures touchera davantage les économies des pays chauds qui sont par ailleurs généralement des pays déjà touchés par de fortes chaleurs.
  • Les actifs échoués (ou « stranded asset ») : il prend en compte les actifs qui vont subir une dévaluation liée à des changements de législation en vue de la transition écologique, des contraintes environnementales imposées et des innovations technologiques. Le secteur des énergies fossiles par exemple est particulièrement concerné, en raison des réglementations en matière de protection de l'environnement et de lutte contre le réchauffement climatique. Les pays émergents seront les plus touchés à l’image de l’Inde, fortement exposé au charbon et qui s’oriente vers un doublement de sa consommation d’énergie d’ici à 2040.

Les choses à retenir :

  • Oui, il a des activités économiques qui nuisent vraiment à la planète (fast fashion, énergies fossiles, etc) ;
  • Investir dans des projets de développement durable ne se traduit pas par une baisse de son rendement. Au contraire, avec la hausse d'études sur le sujet, on voit qu'en terme général, les projets qui prennent en compte l'environnement, la société et la gouvernance performent mieux que les fonds conventionnels.
  • Votre épargne pollue sûrement mais vous pouvez limiter votre impact sur la planète en choisissant de financer des secteurs moins polluant.

Actions concrètes à faire après lecture de cet article :

  1. Appelez votre conseiller pour vous informer sur ce que finance votre épargne. Si vous n'êtes pas satisfait de la réponse, il faut demander un changement de leur part — ou, il est peut-être temps de changer d'établissement.
  2. Choisir des établissements qui se basent sur la transparence, et qui partage les mêmes valeurs que vous. Des établissements à qui vous faites confiance.
  3. Lire notre article sur ce que finance votre épargne.
  4. Partagez cet article à vos proches. Ensemble, on peut changer les choses.